Les jeux de cartes qui se sont développés au fil de l'histoire ont eu une influence sur le vocabulaire, sur la langue française telle que nous la pratiquons aujourd'hui. Et oui, un aussi petit paquet peut avoir une influence si grande dans l'histoire qu'il marque notre langage !
Nous utilisons de façon automatique des expressions qui ont une histoire. Il s'agit ici de présenter de façon un peu arbitraire quatre expressions qui nous viennent en ligne droite de l'histoire des jeux de cartes.
"Annoncer la couleur"
Annoncer la couleur signifie « énoncer de façon directe ce que l'on pense, manifester une honnêteté dans ses paroles ». Cette expression française nous vient du bridge, où le joueur annonce quel couleur est l'atout pour la partie à venir. Il souhaite poser cette couleur comme atout, il annonce donc clairement ses intentions, « annonce la couleur ».
"Le jeu n'en vaut pas la chandelle"
« De toute façon, le jeu n'en vaut pas la chandelle » vous exclamez-vous sans savoir finalement ce que signifie ce que vous dites. Vous désignez par cette expression que cela n'en vaut pas la peine !
Alors quelle histoire pour cette expression ? Remontons avant l'invention de l'électricité, dans un temps pas si lointain où nous nous éclairions à la bougie. Dans les tavernes, les cercles de jeux, c'était aux joueurs de payer de leur propre denier les bougies, les chandelles, servant à éclairer la table sur laquelle se déroulait la partie.
A partir de ce moment-là, le calcul est simple : si la somme en jeu est supérieure au prix de la bougie, nous pouvons jouer la conscience tranquille ; sinon, il faut remettre la partie, nous allons dépenser notre argent pour rien, le jeu n'en vaut pas la chandelle.
"Être sous la coupe de quelqu'un"
« Être sous la coupe de quelqu'un » désigne dans le langage vernaculaire être sous les ordres d'une personne. Et même plus loin : être sous l'emprise de quelqu'un.
Les jeux sont tintés de superstitions, cette expression en est la manifestation. Une habitude des joueurs de cartes est de croire que le sort d'une partie dépend de celui qui coupe les cartes.
Dans une partie de cartes classique, l'un des joueurs mélange, tandis que celui à sa gauche coupe le jeu pour qu'ensuite le premier joueur reconstitue le paquet pour faire la distribution. Certains jeux ne demandent qu'une simple coupe et non un mélange. C'est à mon avis de cette catégorie de jeux qu'est née l'expression.
« Être sous la coupe » de l'adversaire est une position fâcheuse...
Si je peux me permettre un aparté, le monde des tricheurs ne donne pas tort à cette superstition : méfiez-vous de celui qui coupe... et aussi de celui qui distribue !
"Etre à la bourre"
« J'ai pas le temps, je suis à la bourre ». Comprenez : je suis en retard.
Cette expression trouve son origine dans un jeu de cartes aujourd'hui oublié : la bourre. Dans ce jeu « bourrer » signifie tout simplement « perdre », n'avoir plus ou peu d'argent. Le joueur « à la bourre » est celui qui a du retard sur les autres protagonistes de la partie, il est en train de perdre, il faut qu'il rattrape son retard.
Voilà donc quelques expressions choisies qui nous viennent en ligne directe de l'histoire des jeux, de l'histoire des cartes. Cette liste est loin d'être exhaustive ! Si hier les jeux de cartes ont eu une telle influence sur le langage, cela pose tout un ensemble de questions autour de l'expansion, les effets de mode, de certains jeux de cartes, leur déclinaison avec internet, à commencer par le plus célèbre : le poker !